Histoire & Patrimoine pénitentiaire

Présentation

Cours de promenade, établissement pénitentiaire dans l’Entre-deux-guerres

Origine du fonds de photographies Henri Manuel

En provenance du Musée national des prisons à Fontainebleau, la collection photographique des studios Henri Manuel a rejoint l’ENAP en 2007 et rassemble les clichés d’une série de reportages commandés par le Ministère de la justice dans 20 prisons pour adultes et 9 établissements pour mineurs (ces derniers sont conservés à l'Ecole nationale de Protection judiciaire de la jeunesse à Roubaix). Constituée entre 1928 et 1932, cette collection, composée, à ce jour, de plus de 1.000 tirages sur papier, apporte un témoignage historique exceptionnel sur les maisons centrales et les prisons départementales, les personnels et la vie quotidienne des détenus. Elle est désormais accessible dans son intégralité en ligne dans la bibliothèque numérique et dans le catalogue du CRHCP.

L’Administration pénitentiaire dans l’Entre-deux-guerres (1918-1939)

Rattachée au Ministère de la justice depuis 1911, la direction de l’Administration pénitentiaire, où travaillent alors une trentaine de personnes, fusionne en 1926 avec celle des Affaires criminelles.

En région, on dénombre 9 maisons centrales de force et de réclusion pour les condamnés et correctionnels (subissant des longues peines de plus de 1 an jusqu’à la réclusion) dont Melun (pour des peines de plus de 5 ans), Clairvaux qui possède également un quartier réservé aux condamnés militaires, Fontevrault et Nîmes.

Trois maisons centrales sont affectées aux femmes condamnées à l’emprisonnement, à la réclusion ou aux travaux forcés (Haguenau et Montpellier dans notre parcours).

Au total, on compte 8 968 places dans les maisons centrales pour une population pénale qui n’a jamais excédé 7 800 détenus entre 1920 et 1930.


Par ailleurs, en 1926, l’Etat procède, à des fins d’économies, à une réorganisation pénitentiaire en fermant 228 petites prisons d’arrondissement sur 380 et en supprimant 5 circonscriptions pénitentiaires sur 21. Le décret du 3 septembre 1926 prévoit désormais une prison auprès de chaque tribunal de 1ère instance, au chef-lieu du département. L’année suivante, on recense 160 maisons d’arrêt puis 144 en 1929 dont 61 prisons cellulaires (8 615 cellules). La réouverture des établissements d’arrondissement fermés (loi du 22 août 1929) dans les sections de tribunaux ayant rendu en moyenne plus de 400 jugements annuels au cours des années 1920 ramènera le nombre à 274 en 1932. Ces prisons départementales, réparties en 4 catégories selon leur capacité, accueillent les prévenus (correctionnels), les prévenus de justice (accusés) et de correction (condamnés à de courtes peines). Elles sont mixtes et comportent des quartiers séparés.

Les établissements pour mineurs de moins de 21 ans sont sous la surveillance soit des sœurs (La Petite-Roquette par exemple, pour les filles, désaffectée au début des années 30), soit de moniteurs et monitrices, maîtres et maîtresses, comme à Fresnes. Dans les établissements, aucune rénovation importante n’est à noter, les mesures d’économies primant alors sur le financement de travaux d’entretien et d’équipement. La population pénale générale n’excède jamais les 25 000 détenus durant la période.

Les personnels

Dans ces établissements travaillent environ 3 500 fonctionnaires dont 3 200 personnels de surveillance en uniforme (dénommés surveillants depuis 1919). Le personnel est régi par le décret du 31 décembre 1927 qui fixe le « statut du personnel des services extérieurs de l’Administration pénitentiaire », premier texte qui codifie, dans un règlement unique, toutes les modalités concernant le recrutement, l’avancement, l’échelle des traitements (remaniée en 1928) les avantages (logement, soins médicaux, congés…), la discipline etc.

Le personnel est divisé en 3 catégories : personnel administratif, personnel de surveillance, personnel technique (chefs et sous-chefs d’atelier). A ces personnels, il faut ajouter les personnels dits des « services spéciaux » (médecins, pharmaciens, instituteurs, ministres des cultes). Dans les prisons pour femmes, ce sont des religieuses dites « surveillantes congréganistes » qui dirigent l’établissement.

La discipline

La discipline à cette époque est réglée par la circulaire de 1920 qui impose aux détenus des maisons centrales et condamnés dans les autres établissements, le port du costume pénal hérité du 19e siècle (vareuse, pantalon, gilet, béret, chaussons, sabot chemise, cravate pour les hommes, robe de droguet, fichu, tablier, bas de laine, chaussons, sabots pour les femmes).

Dans les maisons d’arrêts cellulaires où l’isolement du détenu est complet, le port du capuchon est imposé lors de tout déplacement pour éviter toute communication entre les détenus. En fait, cette disposition est peu appliquée sauf à Fresnes.