Histoire & Patrimoine pénitentiaire

La relégation ou l'élimination des récidivistes

Ultime recours contre les multirécidivistes, la relégation sert, aux frais de l'Etat, à éloigner définitivement du territoire national les condamnés jugés incorrigibles dont le « relèvement » est impossible, et à peupler et exploiter les colonies françaises (Guyane et Nouvelle-Calédonie). Prononcée par les tribunaux, elle n'est pas considérée comme une peine mais une mesure préventive.

Selon l'abbé Moreau, aumônier de Mazas et de la Grande-Roquette, deux sentiments ont inspiré les débats et la loi du 27 mai que tout le monde, exaspéré par la croissance de la délinquance, semble approuver : un sentiment de protection de la société (« sécurité sociale ») et un sentiment humanitaire, car l'exil conduira à la suppression à court terme de la peine de mort (guillotine sèche contre guillotine sanglante).


Vu de Paris, le « transporté » devient un colon de la Guyane ou de la Nouvelle-Calédonie (« La nouvelle »), éloigné des centres corrupteurs, honnête et travailleur, vivant dans un lieu paradisiaque. En fait, les conditions de détention puis d'installation après la peine sont catastrophiques. En Nouvelle-Calédonie, le libéré est confiné dans un camp, sur la presqu'île Ducos, sans emploi, sans protection, au milieu d'une population hostile, mal nourri et logé.

Questions pénales et pénitentiaires sous Fallières : La relégation ou l'élimination des récidivistes.

Dès 1890, le nombre des relégués diminue car on constate que c'est un échec sur le plan de « l'élimination », de la correction et de la colonisation (mortalité effrayante, agriculture non rentable, nombreuses évasions, mauvaise administration, cession de ses biens et activités par l'Etat à des privés).

Entre 1885 et 1902, plus de 10.000 récidivistes furent envoyés en exil et l'on comptait en 1902, 16.800 relégués et forçats dans les deux colonies françaises. Mal préparée, cette « politique du débarras » fut un échec aussi bien sur le plan pénal qu'économique et financier, sans même évoquer le coût humain de cette déportation ?